Dans les westerns de notre enfance, les scènes d’affrontements entre bons et méchants atteignaient des sommets. Chaque fois qu’apparaissait le desperado, genoux fléchis, bottes plantées dans la poussière, chapeau sur l’œil, un délicieux frisson nous glaçait le sang. Invariablement, la brute dégainait son revolver dans un stupéfiant ralenti et faisait feu sans même viser. Suivait une pétarade qui remplissait l’écran de sang et de fumée. A cette époque, les belles bagarres se réglaient au Smith & Wesson, le revolver de légende de l’Ouest américain !
Créée par Horace Smith et D.B. Wesson, la firme, qui a produit en un siècle et demi plus de six millions d’armes de poing, est toujours florissante. C’est pourquoi, en février 2004, quand James Joseph Minder, soixante-quatorze ans, son président, présente sa démission après un mois seulement d’exercice, il déconcerte ses associés.
« Mon secret est trop lourd à porter. Je vous dois aujourd’hui la vérité, a expliqué Minder devant son conseil d’administration. Sachez donc que, dans les années 1950-1960, je m’étais spécialisé dans… le braquage des banques. Mon arme préférée, celle qui me paraissait la plus fiable, était un Smith & Wesson de calibre 38 mm. »
L’homme a ensuite dévoilé son passé sulfureux. Il a confessé qu’après avoir purgé plus de dix ans de prison, il avait reconstruit sa vie de façon exemplaire. Il avait dirigé des programmes d’aide aux délinquants puis s’était entièrement consacré à la réhabilitation des jeunes drogués. Pour autant, le braqueur repenti avait toujours conservé un goût immodéré pour les armes à feu. Au point, en 200, d’investir toute sa fortune dans une fabrique de revolvers Saf-T-Hammer, qui avait, deux ans plus tard, racheté Smith & Wesson.
Parvenu au sommet de la hiérarchie de la mythique entreprise James Minder avait enfin réalisé son rêve : posséder honnêtement un stock inépuisable de ses revolvers fétiches. Ayant atteint son but, il avait décidé d’affronter sans trembler ses actionnaires. Comme un héros du Far West !