Jusqu'à la fin du XIXème siècle, Guingamp a été le cadre d'un pélerinage renommé dans toute la Bretagne. Il avait pour but la basilique Notre-Dame-du-Bon-Secours, dans laquelle se dressait la seule Vierge noire de la province.
Le pardon se déroulait dans la nuit du samedi au premier dimanche de juillet. Une grande procession parcourait toute la ville et s'achevait devant la basilique. Là, trois feux de joie étaient allumés par l'évêque de Saint-Brieuc lui-même, tandis qu'était chanté un dernier cantique à Notre-Dame. Mais si le pardon officiel était terminé, c'était alors que le plus étonnant commençait. Les adultes et les personnes âgées quittaient les rangs, ne laissant sur place que les jeunes, et voici la suite, telle que la décrit un chroniqueur du temps : "Des cris de joie, des appels, des rires éclatants succèdent au recueillement de la procession nocturne. La foule se rassemble sur la place où tous doivent se coucher pêle-mêle sur la terre nue. Alors, la sainte cérémonie en l'honneur de la Vierge se finit le plus souvent en orgie. Femmes et garçons se rencontrent, se prennnt les bras, s'agacent, se poursuivent à travers les rues obscures et, le lendemain, quand le jour se lève, bien des filles rejoignent leurs mères, le front rouge et les yeux honteux, avec un péché de plus à avouer au curé de la paroisse."
Tout cela ne paraît guère catholique et ne l'était vraisemblablement pas. Le pardon avait sans doute pris la place d'une fête solsticiale païenne et la Vierge noire a probablement évincé une ancienne déesse de la fécondité, mais, malgré tous les efforts de l'Eglise, ces cultes ancestraux avaient traversé les âges.