La soirée du 24 décembre est déjà bien avancée. John Citro, un New-Yorkais de trente et un ans, dispose d'une heure pour faire les courses du réveillon avant le retour de son épouse. Il jette en trombe un manteau sur ses épaules et s'élance dans la rue. Il court une centaine de mètres puis s'engouffre dans un grand magasin. Citro ignore que son existence, jusqu'à présent sans histoire, va soudain basculer dans un cauchemar.
Perdu dans ses pensées, il hésite entre els huîtres et la langouste. Comme la chaleur est étouffante, il ouvre son manteau en grand et défait sa cravate. Aussitôt un cri stridentle fait sursauter. Une énorme vendeuse vociférante pointe un doigt tremblant en direction de son bas-ventre. La foule qui l'entoure s'écarte, horifiée. Un garde de sécurité fond sur lui et le jette à terre. Abasourdi, le nez dans la poussière, Citro ignore les raisons de l'agression dont il est l'objet. "Faire ça un soir de Noël devant les enfants, vous êtes un monstre !" grogne le vigile contre son visage.
John cherche à comprendre. Il se contorsienne pour se libérer et découvre avec horreur que, dans sa hâte, il a oublié de fermer sa braguette et qu'elle laisse entrevoir son sexe. Insulté, humilié, menacé d'être livré à la police, il quitte le magasin sous les huées et rentre chez lui les mains vides. Naturellement, le réveillon est un désastre.
Traumatisé par l'incident, le comptable consulte un psychiatre qui lui prescrit des médicaments anti-dépressifs. Il en abuse et devient rapidement dépendant. La mauvaise publicité donnée à son affaire éloigne la clientèle. Quand il perd son emploi, sa femme le quitte.
Trois mois plus tard, rassemblant le peu qui lui reste d'argent et d'énergien John Citro intente une action en justice contre les propriétaires du magasin, responsables selon lui d'avoir brisé sa vie. "Je ne suis pas exhibitionniste, plaide-t-il, penaud, devant la cour. Bien sûr, j'aurai dû vérifier ma tenue avant de sortir, mais j'ai déjà payé très cher ma négligence."
Sensible à ses arguments, le jury a condamné le magasin à verser à l'étourdi 200 000 dollars de dommages-intérêts.