C’est le roi saint Louis qui a fait construire le port auquel il a donné son nom à l’extrémité du delta du Rhône, lorsqu’il s’est embarqué pour la dernière croisade. Mais la ville n’a pas pris ensuite l’importance qu’on aurait pu imaginer, en raison de difficultés géographiques naturelles.
Le géographe du 1er siècle Strabon notait déjà : « L’entrée du fleuve reste toujours difficile à cause de la rapidité des eaux et des apports de terre qui s’y forment. » Le fleuve amène, en effet, énormément d’alluvions et la côte ne cesse de s’envaser et de reculer. C’est ainsi qu’à toutes les époques les phares édifiés sur la côte se sont trouvés inexorablement relégués à l’intérieur. On ne compte pas moins de dix de ces tours en ruine, qui jalonnent cette progression depuis l’Antiquité. Le dernier en date, la tour Saint-Louis, construite en 1737, est aujourd’hui à 5 kilomètres du rivage. Cette avancée ne se fait toutefois pas de manière régulière et donne lieu à un phénomène très curieux. Pour les 17 millions de mètres cubes de sable et de vase charriés par le Rhône à son embouchure, le moindre obstacle fonctionne comme une digue. Il se constitue ainsi des îles éphémères, les theys, formées généralement autour d’une épave échouée. Elles portent alors les noms du bateau qu’elles recouvrent :
Le Roustan, l’Hannibal, la Tartane. Elles sont à la fois poussées par le fleuve et arrêtées par la mer et, sous leur action conjuguée, accomplissent de curieux trajets, avant de disparaître en se soudant à la terre ferme.