Les Quatre saisons

Ca palpite !

Où passent-elles donc l'hiver, ces petites fleurs qui pointent leur nez mutin aux premiers jours du printemps ? Dans un jardin secret, quelque part dans l'univers, là où les fleurs ne fanent jamais, les légumes sont toujours frais, les fruits mûrs et croquants. C'est ce rêve que je fais en cette saison de renouveau de la nature. Je me console pourtant bien vite en songeant que dans un tel jardin, le jardinier n'aurait rien à faire !
Pas le moindre puceron à comb attre, le râteau n'aurait pas la moindre feuille à se mettre sous la dent... un jardin muet où même les oiseaux n'auraient plus à déterrer le moindre vermisseau, on les leur servirait sur des plateaux accrochés aux nids... un jardin triste où le jardinier ne donnerait plus de la serfouette ou de la binette, En un mot, un jardin où il ne donnerait pas de "l'amour à la terre" comme il le fait quand il le laboure ou qu'il le bêche.
La réalité m'a pourtant vite sauté aux yeux : un tuteur a redresser, un arbuste de la haie à changer, une plate-bande à dresser au carré, un ados bien protégé et exposé au sud pour les premiers semis, un coup de bouillie bordelaise pour prévenir la cloque du pêcher, un léger "bouillon" sur les plantes en pot pour les aider à démarrer. Mille petites tâches qui te comblent de joie le plus empoté des jardiniers. le printemps et son cortège de pâquerettes, de crocus, de perce-neige, de tulipes et de jacinthes - et encore je ne te parle que des felurs cultivées - sont entrés dans le jardin. Le bon jardinier saura le conduire jusqu'au muguet, aux iris et aux roses avec bienveillance et clairvoyance tandis que les "mauvaises" herbes, ces SDF de nos allées, massifs et talus, ne seront pas les derniers à éclore. Laisse-les vivre, leurs fleurs réservent parfois de belles surprises.
Une fois de plus, le jardinier s'apprête à vivre un printemps palpitant !

Un verger pour l'été

Autrefois, les périodes durant lesquelles on pouvait planter au jardin étaient assez restreintes. Il y avait l'automne, pour les plantations dites "à racines nues" (rosiers, arbres fruitiers, arbres et arbustes à feuillage caduc), et le printemps (fleurs vivaces annuelles et tous les arbres et arbustes à feuillage persistant).
Désormais, depuis les progrès techniques de l'horticulture, on peut acheter ses végétaux élevés en conteneur (récipient en plastique noir) prêts à fleurir ou à fructifier pour les installer au jardin ou sur la terrasse la veille même des vacances. On trouve actuellement dans les jardineries et chez les pépiniéristes, non seulement des arbustes en fleurs, mais aussi des arbustes fruitiers nains (hauteur moyenne : 1.50 m) porant fleurs et fruits que tu peux installer sur ton balcon ou ta terrasse à un emplacement ensoleillé dans des grands bacs (40 cm de profondeur et de diamètre au minimum). Une culture facile et un spectacle immédiat pour les jardiniers pressés d'avoir un jardin, même petit, abondamment fleuri. Attention, prépare bien ton verger en pots, en remplissant les récipients d'un bon mélange de terre de jardin et de compost additionné de corne torréfiée. Draîne le fond du pot avec une couche de graviers, et surtout mouille totalement la motte de terre sortie de son conteneur entourant les racines avant de planter. Abricotier "Garden Appigold", amandier "Garden Prince", cerisier "Bing", pêcher "Amber", sont de bonnes variétés de fruitiers nains qui, n'étant pas génétiquement modifiées, te donneront dès la première année des fruits du même calibre que ceux des grands arbres fruitiers.

Les volubilis de l'automne

L'automne arrive avec ses cheveux roux et sa frimousse constellée de taches de rousseur. Petite fille en tablier à carreaux bleus, arrête-toi car c'est la plus belle et la plus riche des saisons.
Apollinaire disait que c'était sa "saison mentale", mais pour moi c'est avant tout l'automne du jardinier. Le chapeau de paille relevé en arrière, on le voit penché sur les plates-bandes, les massifs fleuris et les planches du potager où s'arrondissent presque à vue d'oeil potirons, citrouilles et giraumons comme autant de ponctuations entre les rangs de cornets d'Anjou ou de Bordeaux.
Les verges d'or, en s'ouvrant, nous rendent un peu du soleil de l'été, les chrysanthèmes se font la tête et les amarantes ont des éclats cuivrés.
La grappe déjà ronde et sucrée se cache encore sous les feuilles alors que les fleurs fanées s'envolent dans un cliquetis de sécateur.
Oublie les jardins dela fleur de l'âge d'or ou la coquette primevère rivalisait avec l'aubépine blanche, les centaurées à l'oeil bleu comme un ciel de juillet et les roses colorant le jardin aux aurores triomphantes. On dit que septembre est le mai de l'automne.
C'est bientôt le temps des dernières hirondelles, du vol criard des oies sauvages étouffé par de gros nuages gris, des remords aussi : avons-nous assez fait pour le jardin ?
Tout est prêt pourtant mais rien est achevé. C'est à se demander s'il existe une saison où le jardinier n'est pas en retard !
L'automne, c'est aussi celui de la vie qui passe, des moustaches qui prennent des couleurs de première gelée blanche...
Dans la légère brume du matin, la bêche met plus de temps à retourner la terre. On sème sur des rangs et non plus à la volée mâches et fleurs rustiques, les pots de terre cuite sont alignés en rang d'oignon près de la serre, prêts à reprendre du service.
Le jardinier lui-même se gratte la tête "pour réfléchir", dit-il. La grive, déjà saoule de raisin mûr, remplit l'air de sa musique de cuivre et de bronze, le lichen doré des pierres du muret perd de son éclat alors qu'un volubilis triomphant ouvre ses trompettes mauves pour annoncer un nouveau jardin, un nouveu départ.
Nostalgie ? L'automne n'est pas la saison des regrets, c'est une porte ouverte sur un nouveau printemps. Coup de blues ? Non, et le jardinier, incorrigible rêveur, contemple le massif d'asters fleuris en pensant que c'est une pluie d'étoiles tombées du ciel dans son jardin.
L'automne, c'est aussi cela.