L'histoire de l'humanité est traversé d'étoiles filantes, d'hommes de génie qui s'éclipsent en pleine jeunesse. Tel fut le cas d'Ettore Majorana, un physicien prodige, fils incandescent de Newton et d'Einstein.
Né en Sicile le 5 août 1906, Mojorana entame des études d'ingénieur à Rome à l'âge de dix-sept ans. Aussitôt remarqué par Enrico Fermi, le futur père du réacteur nucléaire, il élabore une théorie du noyau atomique constitué de protons et de neutrons. Il soutient ensuite que le neutrino, une particule électriquement neutre de masse infime, est à la fois matière et antimatière, une hypothèse visionnaire. En 1933, il se coupe du monde, se plongeant notamment dans la lecture des oeuvres de Pirandello, théâtre de l'ambiguïté où fiction et réalité s'interpénètrent. A trente et un ans, dans la nuit du 27 au 28 mars 1938, il embarque à Palerme à bord d'un bateau qui doit le ramener à Naples où il a accepté d'occuper un poste de professeur à l'université. Or, nul ne le voit débarquer, et son corps n'a jamais été retrouvé. Plus de soixante-dix ans plus tard, on continue de s'interroger sur cette disparition. Fuite ? Suicide ? Enlèvement ? Assassinat ? Le génie dissous dans les limbes alimente désormais un mythe inépuisable. Aux théories jusqu'alors en vigueur vient aujourd'hui s'ajouter celle du physicien ukrénien Oleg Zaslavskii. "Majorana n'a fait que s'appliquer à lui-même les principes de sa spécialité, la mécanique quantique. Il s'est placé dans une superposition d'états, à la fois mort et vivant, mais dans des mondes différents." Cette hypothèse a fait sourire bien des physiciens à travers le monde. On dit aussi qu'elle en a plongé d'autres dans un abîme de perplexité.