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 L'oeuf de jument

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Joa
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Joa


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MessageSujet: L'oeuf de jument   L'oeuf de jument EmptyLun 30 Oct - 16:05

Un jour, un garçon de la Sérane (Chaîne de hauteurs qui sépare le lit de l'Hérault de celui de la Vis), qui était marié depuis peu, dit à sa femme, de bon matin, en la quittant au lit :
- Je m'en vais faire chez Martin de la Suque : n'en dis rien, parce que je ne tiens pas à ce que tout le monde connaisse mes affaires.
Il se met en chemin et se dirige vers la maison de Martin, le jardinier :
- Bonjour, monsieur Martin, lui dit le garçon, on m'a dit que vous aviez un poulain à vendre, et, comme j'en ai besoin d'un, vous me feriez bien plaisir de me le donner ; je sais que vous les tenez de bonne qualité, à cause que vous savez bien soigner les oeufs de votre jument. Vous n'en êtes pas à votre coup d'essai, car j'ai vu les poulains que vous avez vendus à Guillaume, mon voisin, et à Pierre, le métayer de la Suque. Le jardinier compris qu'il avait affaire à un niais, et lui dit :
- Je suis bien fâché de ne pouvoir te vendre un poulain ; je n'en ai plus : mais cela ne fait rien, je peux te vendre des oeufs de jument.
- Comment voulez-vous, monsieur Martin, que je puisse faire éclore ces oeufs ? Si j'étais habile comme vous, je pourrais m'en charger.
- Il n'y a rien à faire, je te donnerai un oeuf prêt à éclore : en arrivant à ta maison, le poulain naîtra ; mais fais attention de ne pas le laisser tomber en route, parce qu'il se briserait et le poulain partirait.
- Soyez tranquille, monsieur Martin, j'y ferai attention.
Marché conclu ; le jardinier le conduisit au fond de son jardin, lui choisit la plus belle citrouille qu'il y avait, l'enveloppa dans un sac, la lui mit sur l'épaule, se fit payer deux pièces d'or et le renvoya. Le garçon, content comme un bossu, prend le chemin de la maison, fier d'avoir fait un aussi bon marché. Il comptait, recomptait et disait :
- Si le poulain que tu portes dans cet oeuf pouvait être une jument, ta fortune serait faite : un oeuf par jour, cela ferait trois cent soixante cinq par an. Et puis ta jeune femme serait contente d'avoir un mari industrieux ; tu ferais bientôt concurrence à M. Martin.

Il se frottait les mains de joie. Tout en, se parlant à lui-même, il ne faisait pas attention où il passait ; au moment où il se trouvait à la cime du monticule de la Suque, la citrouille tomba de dessous son épaule, roula sur la pente de la colline, s'ouvrit et se brisa en mille morceaux. En roulant, elle heurta un lièvre au gîte, qui dormait : le lièvre partit et arpenta tout le bois de la Suque. Notre garçon crut que c'était le poulain échappé de l'oeuf qui s'était crevé. Il s'en va mécontent chez le jardinier et lui dit :
- Monsieur Martin, un malheur m'est arrivé ! J'ai laissé tomber l'oeuf de la jument ; il s'est crevé et un beau poulain s'en est échappé. Si vous aviez vu comme il courait en tendant les oreilles ! ... Comme ils doivent être de bonne race, vos poulains !... Mais ce n'est pas tout, il faut que vous me donniez un autre oeuf, en vous payant bien entendu. Le jardinier lui dit :
- Je n'en ai point comme celui que je t'avais donné, mais cela ne fait rien, tu n'auras qu'à le couver pendant un ou deux jours, cela suffira. Il lui donna une autre citrouille, en lui disant :
- Fais-bien attention à ce que je vais te dire : prends cet oeuf, porte-le à la maison, et, jusqu'à ce que le poulain soit éclos, n'adresse la parole à personne ; quoi qu'on te dise, ne réponds pas, sans cela l'oeuf serait gâté.
Le garçon part, arrive bientôt à la maison, monte droit à sa chambre, met la citrouille dans le lit, se met dessus, se couvre bien et couve. Sa femme vient au bout d'un moment et lui dit :
- Que fais-tu, mon Janot ; tu es malade ? ...
Mais le garçon ne dit pas un mot.
- T'est-il arrivé quelque chose ? ... Dis-le-moi ...

Pas un mot. Sa femme appela les voisins, les amis de son mari. Tout le monde arriva, lui parla ; mais lui, toujours ne dit pas un mot. Alors un de ses meilleurs amis dit :
- Moi, je le ferai bien parler.
Il s'approcha de la jeune femme qui était dans la chambre, lui fit les yeux doux et lui donna quelques baisers. Le garçon sortait les yeux hors de la tête ; il finit par n'y plus tenir et dit :
- Pierre, tu es bien heureux que je couve, autrement je te lèverai bien de là.
Il avait parlé, l'oeuf ne valait plus rien, mais sa femme sut qu'elle avait épousé un homme stupide.

Cric, cric, / Mon conte est fini.

M. DOUMERGUE, Revue des langues romanes, 1880
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