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 L'apprenti sorcier

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Joa
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Joa


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L'apprenti sorcier Empty
MessageSujet: L'apprenti sorcier   L'apprenti sorcier EmptyMer 3 Jan - 23:09

Pierre Hâtain retournait un soir de Flottemanville à Gréville. Il ne pleuvait pas, mais il faisait très bas, il n'y avait point de lune. Quand il arrive au pied de la lande de Flottemanville, voilà qu'il entend un grand bruit de la hauteur, comme si diverses bêtes se querellaient. Il y avait des renards, des putois et autres animaux semblables. On entendait comme des chevaux au galop. Quoiqu'il eût grand-peur, il s'approcha. Le bruit cessa tout à coup ; il ne vit plus, il n'entendit plus rien. Il redescendit et chassa (continua) son chemin. Il n'était pas très rassuré ; à la barrière de la lande, disait-on, on voyait souvent un taureau écorché vomissant des flammes. Puis il avait à passer par une cavée, et l'on prétendait qu'entre les hêtres qui formaient une haie bien au-dessus du chemin, des têtes de veau, la gueule enflammée, apparaissaient souvent en poussant d'horribles mugissements. Il passa la barrière sans rien voir ; il avait déjà parcouru une partie de la cavée en pataugeant dans le ruisseau qui courait au milieu et il se croyait hors d'affaire, lorsqu'il entendit un bruit dans les arbres, comme si un objet tombait de branche en branche. Il s'était fait une éclaicie dans le ciel, cela le rassurait un peu. Il s'approcha tout en tremblant de ce qui venait de tomber. C'était un homme tout nu !
- Qu'est-ce que vous faites là, l'ami ?
- C'est toi, Pierre Hâtain ; ne me vends pas, je t'en prie, dit l'homme tout nu.
- Qu'est-ce que tu fais là, dans le haut de la nuit ? lui dit hâtain, qui l'avait reconnu à la voix. Où sont tes hardes ?
- Je t'en prie, mon petit Pierre, ne dis à personne que tu m'as vu ici.
- Et pourquoi es-tu là ? Tu n'es pas venu pour bien faire, j'imagine !
- Ni bien ni mal. Je t'assure. Mais jure-moi que tu ne parlefras de cela à personne.

- Jure-moi d'abord que tu n'avais aucune mauvaise intention en venant ici.
- Je te le jure.
- Soit, je ne te nommerai pas. Mais dis-moi cer que tu allais faire dans les arbres, dans le costume d'Adam, notre premier père.
- Eh bien ! j'allais au sabbat, puisqu'il faut te le dire, au sabbat des sorciers, là-haut sur la lande. Tu viens de par-là ; est-ce que tu n'as rien entendu, en passant ?
- Si ; j'ai entendu comme un grand raout de bêtes qui se disputaient.
- Justement. Il y a des gens qui se changent en bête pour y aller. Il y en a là que tu connais bien, et tu serais bien étonné si je te les nommais.
- Mais qu'est-ce qu'on fait là ?
- On danse, on chante, on s'amuse, on boit. Il y a de jolies filles, on complote de bons tours à jouer. Je te répète ce qu'on m'a dit, car je n'y ai jamais été ; j'y allais aujourd'hui pour la première fois.
- Mais le diable y vient ?
- Vère, mais il ne fait de mal à personne. Il paraît qu'on s-y amuse bien.
- Mais pourquoi es-tu tout nu ?
- C'est l'uniforme. Il faut se mettre tout nu, nu comme un ver, sans quoi on ne pourrait jamais voler.
- Tu es venu ici en volant ?
- C'est-à-dire que j'ai essayé, mais j'ai été un sot. J'ai voulu m'envoler et je suis tombé dans les branches. Vois-tu, pour voler, il faut se frotter une graisse.
- Quelle graisse ?
- Dame ! on me l'a donnée.
- Qui te l'a donnée ?
- Je ne peux pas te le dire, j'ai promis de me taire. On dit que c'est de la graisse d'enfant mort sans baptême ; je n'en sais rien. Arrivé dans le bois, j'ai tiré mes hardes, je les ai cachées dans la haie, ici tout près, nous allons les retrouver ; puis je me suis frotté. On m'avait dit de m'élancer en criant : Pic par sus feuilles !
- Eh bien ?
- Eh bien, je me suis lancé dans l'air, mais la langue m'a fourché. J'ai crié : Pic par sous feuilles ! et je suis tombé dans les branches par-dessous les feuilles et non par-dessus.
- Et à présent tu ne peux plus t'envoler ?

Non, je n'ai plus de graisse, et quand la graisse vous manque, impossible d'aller plus loin. C'est fini pour cette nuit.
- Sais-tu que c'est un vilain péché que tu as voulu commettre là ? Les magiciens, je les comprends, ce sont des savants qui font des prodiges parce qu'ils connaissent les secrets de la nature. mais je ne comprends pas qu'on s'abaisse à être sorcier, car vous baisez le derrière du diable au sabbat ?
- Je n'en sais rien.
- Comment un homme de bon sens, un homme d'esprit comme toi peut-il faire de pareilles choses ?
L'apprenti sorcier retrouva ses habits où il les avait laissés. Pierre Hâtain le ramena chez lui, et tous deux allèrent dormir. Ce qu'il y a de curieux, c'est que le lendemain l'apprenti sorcier prétendit avoir dormi toute la nuit et soutint qu'il ne se souvenait de rien.

Jean Fleury, Contes, récits et légendes des pays de France
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