Le nom de la commune de Bégard, près de Guigamp, dans les Côtes-du-Nord, rappelle celui de Raoul Bégard, un ermite du XIIe siècle, qui fut sans conteste l'exorciste le plus remarquable de son temps. Surnommé "le Vieux Petit Père", il avait le pouvoir de faire revenir les âmes des morts prisonnières des enfers. Pour cela, il se livrait, à la demande des familles, à la cérémonie des trente messes. Les vingt-neuf premières étaient dites dans n'importe quelle église, mais la dernière devait se dérouler dans la chapelle Saint-Hervé, au sommet du Menez Bré, sur la commune actuelle de Bégard. L'office avait lieu à minuit. Le Vieux Petit Père se rendait seul au sanctuaire avec un sac rempli de graines de lin. Le goupillon à la main, il en aspergeait le chemin pour chasser les âmes errantes. Une fois dans l'église, il disait la messe à l'envers. Venait alors le moment crucial. Il faisait l'appel des démons dans un ordre précis. Il ne devait pas se tromper dans sa liste sous peine de se damner lui-même. Lorsqu'il voyait arriver celui des diables qui tenait dans sa gueule l'âme qu'il voulait racheter, il lui ordonnait de la lui rendre et celui-ci s'exécutait. Ensuite il devait payer chacun des démons d'une graine de lin.
Si de nos jours nous ne croyons plus guère à ces diableries, Raoul Bégard, le Vieux Petit Père, lui, y croyait.
Et il fallait qu'il possède un sacré courage pour pratiquer de genre de cérémonie, seul, la nuit, au sommet du Menez Bré !