(Bouches-du-Rhône)
La cathédrale Saint Sauveur, à Aix-en-Provence, contient de nombreux chefs-d'oeuvre de l'art religieux, dont le tryptique du Buisson ardent. Mais, s'il est moins célèbre, le tableau de l'Annonciation conservé dans l'église Sainte-Madeleine toute proche est étonnant à bien des points de vue.
C'est également l'élément central d'un ancien tryptique dont les deux panneaux latéraux sont perdus. Ce très beau spécimen de l'art pré-Renaissance représente, ainsi qu'il est habituel, l'ange Gabriel annonçant à la Vierge Marie sa future maternité miraculeuse, tandis que Dieu le Père les bénit depuis le ciel.
Mais si le sujet est conforme au texte des Ecritures, la façon dont il est traité est plus que singulière. L'ange et la Vierge ont des expressions inquiétantes, presque maléfiques. Dieu le Père fait un geste bizarre avec les doigts, les ailes de Gabriel sont faites de plumes de chouette, un oiseau de mauvais augure, des chauve-souris volent dans un coin et, au premier plan, dans un vase posé à même le sol, sont réunies des fleurs de digitale, de belladone et de basilic qui, toutes, passaient pour être diaboliques.
De l'avis des spécialistes, toutes ces incongruités sont parfaitement volontaires. Le peintre, sans doute Guillaume Dombet, un Bourguignon originaire de Dijon venu s'installer à Aix entre 1420 et 1460, n'avait pas été payé au prix qu'il réclamait par le commanditaire de l'oeuvre et il a, au dernier moment, transformé son tableau de cette manière pour se venger.