L'église Saint-Etienne, située derrière, l'hôtel de ville de Beauvais, abritait, jusqu'au début du XXe siècle, deux statues pour le moins singulières.
La première était celle de sainte Angradesme, patronne de la ville, qui avait fait voeu de chasteté, mais qui était poursuivie par ses soupirants en raison de sa grande beauté. Pour les décourager, elle obtint de Dieu d'avoir le visage défiguré par un horrible ulcère. La statue était, paraît-il, d'un réalisme saisissant et soulevait le coeur quand on la regardait.
Mais celle de sainte Wilgeforte, qui lui faisait face, n'était pas moins affreuse. J.K. Huysmans, grand amateur de curiosités religieuses, a consacré à cette sainte plusieurs lignes dans son roman En route. Fille d'un roi du Portugal, elle avait fait également voeu de chasteté et refusa d'épouser Amare, roi de Sicile, que son père lui avait choisi comme époux. Elle aussi demanda à Dieu d'être enlaidie pour échapper au mariage, et elle reçut la faveur de devenir barbue. Furieux, son père la fit rouer de coups et crucifier. Datant du XVIe siècle et réalisée en bois polychrome, la statue de l'église Saint-Etienne représentait la malheureuse crucifiée avec sa longue barbe. Elle jouissait d'une grande popularité à Beauvais auprès des femmes mal mariées qui venaient y déposer des cierges, afin d'être débarrassées de leur époux.
Ces pratiques contestables ainsi que le côté peu plaisant de ces oeuvres d'art ont conduit le clergé à les retirer de l'église. Nul ne sait ce qu'elles sont devenues.