Ablon, cette paisible commune sur la Seine, qui compte plus de cinq mille habitants, a connu une brusque effervescence à la fin du XVIe siècle, après les guerres de Religion. C'est là, en effet, qu'Henri IV décida, le 14 décembre 1599, suite à l'édit de Nantes, que serait construit un lieu de culte pour les protestants de Paris.
La distance était relativement importante à l'époque et, chaque dimanche, les fidèles éprouvaient les plus grandes difficultés à se rendre sur place. Les gens aisés venaient à cheval ou en calèche, mais, pour les plus modestes, le moyen de transport le plus commode était le coche d'eau, bateau omnibus qui remontait la Seine jusqu'à Corbeil et qu'on surnommait pour cette raison corbillat ou corbeillard.
Il était depuis longtemps réputé pour sa lenteur et son inconfort et comme il était en outre absolument bondé, les voyages étaient de véritables calvaires. Selon l'un des utilisateurs de l'époque, Isaac Casaubon, le trajet était "une vraie pénitence, un moyen assuré de gagner le paradis". Tout cela cessa avec la révocation de l'édit de Nantes, en 1685. Mais, entre-temps, le coche d'eau de Corbeil s'était acquis une autre célébrité. Lors d'une épidémie, il servit à emporter les nombreux corps qui encombraient la capitale, passagers qui, eux, ne risquaient pas de se plaindre. Entre-temps également, le bateau omnibus avait changé de dénomination, c'était un troisième surnom qui s'était imposé, corbillard, et le nom est resté pour désigner un véhicule funéraire.