Au XIXe siècle, la condition des canuts, les ouvriers de la soie lyonnais, s'est brusquement dégradée, au point de provoquer en 1831 la première révolte ouvrière française. Touché, comme tant d'autres, par le chômage, Laurent Mourguet (1769-1844) s'est mis à faire un peu tous les métiers : marchand-ambulant, arracheur de dents, puis montreur de marionnettes. C'est alors qu'il eut l'idée de remplacer Polichinelle par un personnage vraiment lyonnais.
C'est ainsi qu'est né Guignol, un canut portant le costume des ouvriers de la soie au XVIIIe siècle, un chapeau noir, et exprimant avec une gouaille toute populaire le mécontentement des petites gens. Guignol, éternel et sympathique râleur, part en guerre contre les injustices, se moque des bourgeois et ridiculise l'autorité, incarnée par le gendarme. Il est accompagné de Gnafron, bon vivant un peu ivrogne, "regrolleur" de son état, c'est-à-dire cordonnier, un haut-de-forme cabossé sur la tête et une bouteille de beaujolais à portée de main. Le héros est également assisté de son épouse Madelon, une femme au tempérament passablement acariâtre, mais finalement très fière des exploits de son mari. La création de Guignol a été une réussite immédiate. Typiquement lyonnais au départ, le personnage n'a pas tardé à conquérir la France entière. En même temps, il a évolué. Au débutn spectacle contestataire proche des chansonniers (tradition reprise par "Les Guignols de l'info") il est devenu un divertissement pour enfants.