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 Harpalionu

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Joa
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Joa


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Harpalionu Empty
MessageSujet: Harpalionu   Harpalionu EmptyVen 11 Mai - 10:20

Certaines fables littéraires furent reprises oralement par les conteurs, chacun y ajoutant sa note personnelle. Harpalionu est la variante corse d'une fable dont on trouve déjà les motifs chez Marie de France et Esope.

Un âne se mit un jour en tête d'aller faire fortune. Le voilà rompant son licol et courant, courant dans la prairie. L'herbe était haute et savoureuse et le chardons n'y manquaient pas. Heureux de cette bonne chance, le baudet se mit à braire tant et si fort et si joyeusement qu'un lion qui, par hasard, se trouvait là, vint voir de quoi il s'agissait. A la vue de l'âne, il resta étonné. Jamais dans ses courses il n'avait vu un pareil animal. Après quelques instants, il s'approcha pourtant du baudet et lui demanda :
- Comment t'appelle-t-on ?
- Harpalionu.
- Harpalionu ?
- Oui.
- Tu es donc si fort pour oser te dire au-dessus des lions ?
- Dans le monde entier, il n'est pas d'être qu'on puisse me comparer.
- Eh bien ! puisque tu as une force aussi prodigieuse je vais te proposer un marché.
- Et quoi ?
- C'est de faire un traité afin de nous liguer contre tous les autres animaux.
- Je veux bien dit l'âne.
Et les voilà partis tous les deux à travers champs. Or il arriva qu'il fallut traverser une rivière. D'un saut, le lion atteignit la rive opposée. L'âne, au contraire, se mit à nager si maladroitement qu'il risqua mille fois de se noyer. Enfin, il réussit à le passer.
- Comment, dit le lion, étonné de tant de maladresse, tu ne sais donc pas nager ?
- Moi ! Je nage mieux qu'un poisson.
- Et alors, pourquoi es-tu resté si longtemps à travers ce ruisseau ?
- Ah ! c'est qu'avec ma queue j'avais pris un énorme poisson, si gros, si gros, que son poids me faisait foncer. J'ai été obligé de le laisser pour venir te trouver.
Le lion se contenta de la réponse, et, de nouveau, les deux animaux se mirent en route. Une muraille se présenta bientôt. Le lion l'a franchit d'un bond. Le malheureux baudet ne put faire aussi grande diligence. Il leva d'abord ses pattes de devant, puis par un suprême effort, il réussit à monter sur le mur. Mais alors, il ne put plus ni avancer ni reculer.
- Eh bien ! que fais-tu donc là ? cria le lion ?

- Ne vois-tu pas que je me pèse ? Je veux savoir si la part de devant est aussi lourde que celle de derrière.
Enfin, après bien des efforts, Harpalionu franchit le mur. Une fois par terre, le lion dit à son compagnon :
- Je crois que tu me trompes, car à ce que je vois, tu n'as aucune force.
- Tu crois ? Eh bien ! parions à celui qui le premier jettera cette muraille par terre.
Aussitôt le lion se met à donner de grands coups de patte dans le mur. Mais il ne faisait que se blesser sans aboutir à rien. Au bout de quelques instants, il s'arrêta.
- Moi, je ne puis le démolir. Voyons si tu seras plus heureux.
L'âne se mit alors à ruer de telle sorte qu'en peu d'instants le mur fut à bas.
- Eh bien ! que dis-tu de cela ? te crois-tu encore plus fort que moi ?
- Jusqu'à présent, dit le lion, je me croyais le plus fort des animaux, mais je vois que je me trompais ; tu l'es beaucoup plus que moi.
- Et encore, reprit Harpalionu, tu ne sais pas de quoi je suis capable.
- Qu'as-tu donc de si extraordinaire ?
- Je mange des épines.
- Des épines ?
- Oui.
- Je serais bien curieux de voir çela.
- Tiens, vois-tu celles qui se balancent là.
- Oui.
- Je vais les manger.
Et Harpalionu se mit à tondre de beaux chardons tels qu'on en a jamais vu de pareils. Emerveillé de tout cela, le lion dit à son ami :
- Vraiment tu es un animal extraordinaire, aussi je vais te faire nommer le roi des lions.
- Je veux bien, dit l'âne.
Une réunion de tous les lions de la contrée eut lieu le lendemain, et Harpalionu fut reconnu comme roi. Dans cette nouvelle position, notre baudet vécut fort heureux pendant de longues années, d'autant plus qu'il ne disputait jamais à ses sujets les animaux qu'ils avaient tués. Enfin, les maladies qui ne respectent jamais la vieillesse assaillirent Harpalionu, de sorte qu'un beau matin, tous les lions le trouvèrent mort. Ils l'enterrèrent en grande pompe, et, pendant longtemps, les plaines et les forêts retentirent de leurs terribles hurlements de douleur.

J.-B. Frédéric ORTOLI, les Contes populaires de l'île de Corse, 1883
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