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 Les contrebandiers basques

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Joa
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MessageSujet: Les contrebandiers basques   Les contrebandiers basques EmptyMer 12 Sep - 9:01

Texte rédigé en 1841

Il y a deux espèces de contrebande, l'une en grand et qui opère sur toute matchandise de commerce par des associations bien organisées ; l'autre, de détail, se fait par des individus isolés et sur des articles de consommation journalière, tels que sucre, café, chocolat, sel, tabac et autres denrées en petites quantités. Hommes, femmes, enfants, tous pauvres, et n'ayant pas d'autres moyens d'existence au milieu des montagnes, voilà les petits contrebandiers. Quoi qu'on en dise, ces gens-là, sans la contrebande seraient obligés pour vivre de quitter leur demeure, de chercher gîte ailleurs, ou de se faire mendiants et voleurs en restant dans leur pays. Arrêtés par les préposés de la douane, ils font cinq, six mois ou plus de prison ; puis à peine libérés, ils recommencent leur même genre de vie ; ils ne sauraient subsistern autrement. C'est ce que disait, il n'y a pas longtemps, un maire cité devant l'un de ses supérieurs : "Je suis maire, et cependant contrebandier ; tous mes administrés font aussi la contrebande. Comment nous en empêcher ? Nos terres, quelque abondantes que soient nos moissons, ne produise pas de quoi nous alimenter six mois : irons-nous augmenter le nombre des mendiants de la plaine ? et ne vaut-il pas mieux nous industrier un peu et utiliser notre voisinage avec l'Espagne, unique bien qui soit à notre portée ?"
La contrebande en grand est une véritable profession qui occupe partout beaucoup de bras. Des hommes très probes et vraiment honnêtes en font partie ; leurs chefs sont connus, et l'on est sûr de rencontrer parmi eux une fidélité, une droiture, un dévouement tout chevaleresque : ce qui se comprend du reste, leur profession reposant surtout sur la confiance qu'inspire leur caractère, et sans laquelle les négociants n'oseraient pas recourir à leur concours. Quant à ceux dont la réputation de probité n'est pas suffisamment établie, on exige d'eux un cautionnement. Qu'on les appelle, les uns ou les autres, fraudeurs, ils s'indigneront : "Nous ne faisons pas un métier de fraude, diront-ils. A quatre pas de nous sont des marchandises à bas prix, la douane nous défend d'y toucher. Pour favoriser le commerce de quelques riches maisons, de quelques grandes villes industrielles, on nous veut dans la misère. Le gouvernement nous menace d'amende, nous la payons, trop souvent, hélas ! mais sans regimber, et l'Etat, en somme, n'y perd rien. Ceux qui y perdent un peu sont quelques commerçants, qui, sans nous, gagneraient davantage ; mais quelle injustice y a-t-il à partage quelques bénéfices ? Ne sommes-nous pas hommes et Français comme eux ? Ils ont des fabriques, des produits ; nous, nous avons la frontière : chacun tire parti de ce qu'il a."

Quelquefois, il est vrai, la frontière est inclémente, et les contrebandiers tombent dans des embuscades disposées pour les recevoir. Ils veulent résister, et laissent des morts, des blessés ou des prisonniers ; mais de pareilles luttes sont de plus en plus rares. le contrebandier reconnaît que les douaniers sont payés pour faire leur devoir, et il sait qu'en abandonnant à propos sa charge à leur convoitise, il échappera au danger qui le menace. C'est dans ce cas, pour ainsi dire, une convention tacite et muruelle, et voici pourquoi l'habit vert s'y prête : par la mort ou pas la capture du contrebandier, il y a pour le douanier chances à peu près inévitables de cruelles représailles ; par la saisie pure et simple de la contrebande, allocation lui est attribuée comme part de prise. Partant d'une logique aussi serrée, la préférence est bien vite donnée au ballot, et la fuite assurée au porteur.
Telle est la manière dont se passent le plus habituellement les choses, quand il s'agit de marchandises ; mais si le contrebandier a charge d'âme, comme dans le passage de la princesse de Beira de France en Espagne, il est obligé de changer tout à fait de tactique, surtout de déployer un esprit de ressources, un sang-froid, un courage qui ferait la fortune d'un général.
C'était en novembre 1835. la princesse de Beira, fiancée à don Carlos, son beau-père, était partie subitement de Naples avec le Comte de Custine et une Portugaise, sa dame d'honneur. En traversant Toulouse, elle prit le prince des Asturies, fils de son futur époux, aujourd'hui le comte de Montemolin, et continua rapidement son voyage vers Bayonne. Elle ne fit pas long séjour, et se cacha d'abord à Biarotte chez le baron d'Olce, puis chez M. de Roll, au château de Montpellier, sur les bords de l'Adour.

Sa retraite fut bientôt découverte et dénoncée à M. Hénault, alors sous-préfet de Bayonbe, qui avisa immédiatement aux moyens de faire surprendre et arrêter la royale fugitive ; mais avertie à temps par de fidèles émissaires, elle quitta un dimanche matin le toit hospitalier de la famille de Roll, traversa l'Adour en face d'Urt, et trouva là des chevaux pour elle et son cortège, des contrebandiers pour la piloter, et un négociant de Bayonne, M. Darrotchès, agent carliste, pour chef de la caravane.
Après avoir marché presque toute la journée dans le vaste bois de Mixe, que probablement ses guides connaissaient mal, elle arriva dans l'après-midi sur les hauteurs limitrophes des pays de Mixe et d'Arberoue, d'où l'on découvre le joli vallon de Méharin. Le dîner de la petite troupe y avait été commandé dans la maison Sallaberia, chez un laboureur cabaretier ; mais le comte de Custine, trouvant le lieu mal choisi, décida la princesse à préférer à cet asile l'antique et noir château qui dressait ses quatre poivrières au milieu de la vallée, donnant pour raison qu'il avait connu son propriétaire, le vicomte de Belsunce, dans la garde royale, d'où il sortait lui-même. Le plan de marche ainsi modifié fut exécuté ; le chef de la petite troupe, détaché en avant, alla demander l'hospitalité au châtelain, qui s'empressa de l'accorder sans savoir encore à qui il la donnait. Les chevaux furent renvoyés ; un de contrebandiers d'escorte, Batista Etchegoyen, fut dépêché, muni d'instructions, à Macaye, vers le chef célèbre de la contrebande labourdine, le brave et loyal Ganis (Ganis, en basque, veut dire Jean).
Celui-ci arriva vers le milieu de la nuit, suivi de plus ou moins près d'hommes à lui amenant deux chevaux et portant des paquets qui contenaient des travestissements. Pour gagner plus promptement et plus facilement la frontière, il fallait nécessairement traverser Hélette, gros bourg servant de résidence à un poste nombreux de douaniers, et se soustraire à leurs regards inquisiteurs. Afin d'y parvenir, l'adroit Ganis profita d'un enterrement qui devait avoir lieu à dix heures et demie ; il partit de Méharin à neuf heures du matin, accompagnant à pieds ces dames vêtues de l'habit de deuil des paysannes aisées de la basse Navarre. A une courte distance du bourg, elles durent mettre pieds à terre et se rendre directement à l'église, où elles trouvèrent, à une place déterminée, une femme costumée comme elles reconnaissables à sa haute taille et à quelques signes convenus. C'était la soeur de Ganis, derrière laquelle devaient se placer et que devaient imiter et suivre dans tous ses mouvements la princesse et sa camériste. Le capuchon de leur grand mantelet rabattu sur les yeux, selon l'usage du pays, elles assitèrent à l'office, suivirent le corps au cimetière, et, après l'inhumation, le cortège des parents du défunt, ce qui leur permit de passer sans éveiller de soupçons devant la caserne et le poste des douaniers. Bientôt après, elles arrivèrent dans un bas-fond, où les attendaient leurs chevaux, Ganis et Batista. On reprit vivement le chemin de Macaye, et le soir on s'abritait sous le toit hospitalier de Ganis.

Fatiguée par la route et par ses mille émotions, la princesse comptait se reposer chez son brave guide, lorsque, au commencement de la nuit, l'alerte fut donnée. Environ quinze ou dix-huit cents hommes, douaniers, soldats, gendarmes, réunis dans le voisinage et stimulés par la somme de deux mille francs promise à celui qui parviendrai à s'emparer de la princesse de Beira, commençaient de loin à cerner la maison. Sans s'émouvoir,Ganis prévient ses hôtes, les entraîne à pied, et arrive bientôt sur le bord de la rivière. Gonflée par une pluie d'orage qui durait encore, elle eût opposé un obstacle sérieux à des voyageurs vulgaires ; mais Ganis était grand, très fort, surtout déterminé ; il a promis de sauver la princesse, de la rendre à son royal fiancé. On entend déjà les cris et le bruit des pas de ceux qui la poursuivent : l'audacieux contrebandier l'étreint, l'enlève, la charge sur ses épaules, et, après avoir fait un fervent signe de croix, il entre résolument dans l'eau.Il en a bientôt jusqu-au dessous des aisselles ; la violence du courant le fait un moment chanceler ; il entend derrière lui une voix, tourne la tête et voit la rive qu'il vient de quitter garnie d'uniformes. Ce fut pour lui un puissant stimulant : il fit un suprême effort, et peu d'instants après, suivi de son frère qui portait la dame d'honneur, il toucha heureusement la terre d'Espagne. La princesse, saine et sauve, était chez elle. Vaincus, mais non convaincus de l'insuccès de leurs efforts, les gendarmes ramenèrent à Bayonne, de brigade en brigade, un savant géologue, M. de Colegno, qui explorait les environs et que son accent italien fit prendre pour l'infante portugaise.
Le lendemain matin, le vent du sud apportait jusqu'à Bayonne les sons joyeux de cloches d'Urdache et de tous les villages de la frontière, qui annonçaient et célébraient le mariage de la princesse de Beira avec son royal fiancé, le prétendant don Carlos de Bourbon. Le comte de Custine et le prince des Asturies étaient restés chez le vicomte de Belsunce, où Batista alla les prendre dans l'après-midi. Travestis en paysans basques, ils montèrent à cheval et partirent sous la conduite de l'infatigable piéton Etchegoyen, qui les fit heureusement arriver, par un chemin différent, sur un autre point où les attendait Ganis.

Le même chef de contrebandiers, homme fort honnête, très estimé, s'est signalé par sa grandeur d'âme dans une scène des plus dramatiques. Un bâteau chargé de contrebande vogait vers Bidache. La régie, informée à temps, se présnete pour saisir la proie ; le contrebandier surpris s'avance vers le principal employé, qui, se méprenant sans doute sur les intentions du délinquant, lui tire à bout portant un pistolet chargé à balles. Sur un signe du chef, tous les préposés sont saisis, garrottés, embarqués avec la contrebande et conduits vers une rive isolée, dans le bois de Mixe. Là, on les attache à autant d'arbres, on les couche en joue. Le chef calme la fureur de ses compagnons, et leur défend de faire feu avant son ordre. Il se retire à l'écart, fouille avec un couteau sa blessure, reconnaît qu'elle n'est pas mortelle, et, en ayant extrait la balle, il va la présenter à elui qui l"a blessé : "Apprends d'un contrebandier, lui dit-il, à respecter la vie de tes semblables. Je te aprdonne ; mais n'y reviens pas." On les laissa sans leur faire aucun mal.
A la suite de cette rencontre, et sur la plainte du préposé Saint-Blancard, qui avaitb fait feu sur Ganis, un mandat d'amener fut lancé contre lui ; mais il disposait en souverain de cinq cents hommes dévoués. De plus, il était fiancé avec une jeune héritière, il ne voulait donc pas se laisser arrêter. De Bidarray à la frontière, il n'y a pas loin : Ganis passa sur le sol espagnol. Là, sa fiancée se rendait tous les soirs au pied de la montagne, d'où, nouveau Léandre, il descendait léger et amoureux, mais non sans craindre les pièges d'ennemis bien autrement perfides que l'onde.
Un soir, Ganis rappelle à sa jolie fiancée que le mardi suivant était le jour précédemment choisi pour leur union, et lui déclare qu'il n'entend pas la différer. L'entreprise était périlleuse, téméraire : il pouvait être enlevé à la couche nuptiale et livré à la justice. N'importe : une moitié de ses hommes fera le guet jour et nuit, pendant que les autres siégeront au festin des noces ; au vout de vingt-quatre heures on se relèvera. Les choses se passèrent ainsi, et, pendant trois jours, durée ordinaire d'une fête pareille, Ganis fut tout à, sa femme et à ses amis, aussi complètement et avec autant de calme que s'il n'eut point été menacé. Puis, congédiant son monde, il regagna sa retraite.

Cependant les négociations marchaient activement ; tout le commerce de Bayonne s'employait pour le chef aimé et estimé de la contrebande. Enfin, il fut convenu avec le jury de Pau que Ganis irait, un jour désigné, se constituer prisonnier et demander son jugement immédiat. La partie adverse, les témoins, tous étaient présents, lorsque l'accusé vint seul et fier demander qu'on lui ouvrît les portes de la prison.
Le plaignant Saint-Blancard était assisté du préposé Lagarde, qui déposa contre le contrebandier. Ganis indigné, mais calme, se lèbe ; sa taille élancée, élégante et vigoureuse, sa belle et mâle figure, le port si noble et si fier de sa tête, sa voix harmonieuse et forte qu'éccompagne un regard écrasant, tout en lui impressionne vivement l'auditoire. Apostrophant le témoin, il rétablit les faits dans leur intégrité, et lui reproche de les avoir altérés et tronqués ; il se rassied ensuite après cette tirade, qui, fidèlement traduite par l'interprète, fu couverte d'applaudissements. Interrogé de nouveau, le préposé Lagarde confirma le récit de Ganis ; l'avocat fit ressortir dans tout son éclat la magnanimité de son client, et celui-ci fut acquitté d'enthousiasme et à l'unanimité.
Voilà le vrai type du contrebandier noble, tel que peut le désirer un romancier. Grand, robuste, humain, d'une probité exquise, la pariole de Ganis vaut contrat dans le pays ; comme son courage, les mille ressources de son esprit sont sans limites. Il eût fait un beau et brave chef de parti. pris quelquefois, il paie largement son amende, et reprend ensuite de plus belle avec succès. Les services qu'il a rendus à la famille déchue d'Espagne lui ont valu une rente viagère de dix-huit cents francs. Il y a d'autres chefs et d'autres compagnies ; mais Ganis est le plus connu, le plus recommandable sans contredit, celui dont la biographie serait la plus intéressante et la mieux remplie.

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MessageSujet: Re: Les contrebandiers basques   Les contrebandiers basques EmptyLun 17 Sep - 8:57

.../...
Le Béarn a aussi ses bandes, qui sont nombreuses.
Quant à la vie et aux moeurs des contrebandiers basques, elles ne diffèrent guère de celles des autres habitants : "Un béret en drap bleu pour coiffure, une veste à la carmagnole, une cravate à la batelière, une ceintur de soie rouge, un pantalon brun et des sandales en ficelles tressées et assujetties au-dessous des chevilles, voilà le costume du contrebandier basque. Quelquefois, pour se garantir du froid des montagnes, il prend une casaque faite en peau de mouton noir, ou bien il endosse une tunique brune, taillée et découpée à la façon de la dalmatique d'un sous-diacre. Rien de plus bruyant dans sa gaieté, de plus poétique dans son langage, de plus terrible dans sa colère que le contrebandier basque. Des cris aigus, les danses les plus pittoresques, des allégories mythiques, des coups de bêton traduisent et rendent ces divers sentiments, qui peuvent d'ailleurs se succéder et varier chez lui avec la rapidité de l'éclair. Ardent, leste, infatigable, il peut faire ses dix lieues par nuit, avec une charge de soixante livres sur le dos, et recommencer le lendemain sans qu'il y paraisse. Jamais il ne quitte son couteau à longue lame pointue, ni son bâton de néflier ferré, et lorsqu'il est en course, ses cheveux, qu'il porte toujours longs, sont retroussés par-derrière et sous son béret. Vers trente-six ans, il quitte la profession ; alors ses dents perdent de leur fraîcheur, et des douleurs rhumatismales commencent à l'atteindre. Comme tous les montagnards, il est superstitieux et croit aux revenants, aux apparitions. Il se montre surtout aussi fataliste qu'un vieux Turc : "Cela devait être", dit-il en se signant gravement àn tout événement malheureux."

Ainsi constitués, les contrebandiers basques ont su déjouer tous les moyens de surveillance et de répression que le gouvernement avait accumulés sur la frontière des Basses-Pyrénées, depuis Hendaye jusqu'à Bedous, pour maintenir les prohibitions d'exportation auxquelles le traité de la quadruple alliance l'assujetissait. Bien des gens s'en étonnent encore ; mais s'ils connaissaient les pays du Labourd, de la Soule, leurs montagnes irrégulières et la multitude des sentiers qui les traversent, le problème alors ne leur paraîtrait pas aussi insoluble. Ajoutez à ces données topographiques si favorables un espionnage actif auquel toute la population participait depuis Bayonne jusqu'à l'extrême frontière, quelques connivences coupables d'agents subalternes, des assistances mercantiles : tout concourrait, comme on le voit, à faire prendre à cette contrebande politique de grandes et inévitables proportions. A ctte exhortation d'argent, d'hommes, d'armes, de munitions et d'effets d'équipement, géré par entreprises, durant cinq ans, quelques spéculateurs indigènes ont fait des fortunes, et des banquistes, venus d'ailleurs, se sont enrichis, exploitant indifféremment toutes les circonstances, à mesure qu'elles se présentaient. Quant aux assureurs, répartis dans les bourgs de la frontière, la plupart sont aujourd'hui, en 1841, électeurs, membres du jury, et, par conséquent, appelés à juger leurs pairs, les contrebandiers. pendant ce temps, le haut commerce de Bayonne, repoussant ces moyens illicites, s'éteignait faute de débouchés autres que l'Espagne.

Les contrebandiers basques de ce pays n’ont rien, à ce qu’il paraît, qui les distingue de ceux du nôtre. Un officier anglais, qui leur a consacré deux pages dans le récit d’une campagne faite avec Zumalacarregui en Navarre et dans des provinces basques, ajoute ces détails à quelques autres qui feraient ici double emploi : « Le plus grand péril qu’ils courent, dit-il, vient de leur répugnance à se dessaisir de la marchandise qu’ils essaient de passer. Le nombre des douaniers et des soldats qui périssent dans leur rencontres journalières avec eux n’ait jamais connu, le gouvernement et les habitants du pays s’accordant à le tenir secret. En général, les contrebandiers font choix,, pour leurs expéditions d’une nuit noire et pluvieuse ou orageuse. Cinquante ou soixante hommes passeront parfois par la route même où stationne un poste de douaniers ou de soldats ; chacun porte sur la tête une balle d’un poids considérable et, marchant sur la pointe du pied, en une longue file, ils imitent avec leurs pas le bruit des gouttes de pluie qui tombent. Sont-ils découverts, ils laissent rouler leur charge le lo,g d précipice, et, bondissant après elle avec la légèreté de l’isard, ils disparaissent en un clin d’œil. Quelquefois, cependant, leurs longs couteaux font taire toute espèce d’opposition. » L’auteur termine en signalant la probité chez des hommes où l’on ne s’attendait guère à la rencontrer, et le sentiment de confraternité qui unit tous les contrebandiers de la frontière, ou plutôt les Basques des deux versants, qui, dit-il, le sont presque tous, et il attribue à ce sentiment la sympathie manifestée de notre côté en faveur de don Carlos.

Francisque Michel, Contes, récits et légendes des pays de France
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