A cinquante-quatre ans, Giovanni Vigliotto n'a rien perdu de sa superbe. Portant beau, les tempes argentées, ce fringant américain comparaît devant le tribunal de Phoenix, en Azizona. Chef d'inculpation : abandon de domicile conjugal et escroqueries aggravées. Vigliotto s'est, en effet, éclipsé après la nuit de noces, empochant les économies de sa nouvelle conjointe. Cette dernière, bafouée et furieuse, s'est lancée à sa poursuite et a fini par le faire arrêter, quatre mois, douze Etats et 16 000 km plus loin.
"Quelle est votre profession ? lui demande le juge.
- Commerçant, répond le bellâtre. Je vends, j'achère, je gagne ma vie ici et là. J'ai même travaillé sous des pseudonymes à la CIA."
Le juge poursuit son interrogatoire dans beaucoup d'effort, Giovanni n'est pas avare de confidences.
"Combien de fois avez-vous changé de nom ?
- Difficile à dire. J'ai commencé mes errances à l'âge de huit ans, en compagnie d'un oncle, après la mort de mes parents. Di Brésil à la Corée, j'ai arpenté la planète. Dans les pays où j'ai séjourné, j'ai chaque fois changé de nom et de... femme !
- Que voulez-vous dire par "femme" ? demande le magistrat, intrigué.
- Ben, que je me suis marié dans tous les pays", précise Giovanni.
Et le prévenu raconte devant le tribunal éberlué qu'il a effectivement épousé une bonne centaine de femmes dans une trentaine de pays.
"Et, j'imagine que vous avez soulagé toutes vos femmes de leurs économies ?
- Ah non, monsieur le juge ! se récrie le don juan. Pas toutes ! J'ai même un témoin à décharge."
Après enquête, on retrouve effectivement une certaine Jenny Paterson, que Vigliotto a épousée deux fois en Floride et à qui il n'a rien volé.
"Pourquoi l'avoir épargnée, elle, et pas les autres ? demande le magistrat.
- Je suis sentimental et Jenny était sans le sou !"