Par un beau matin, Fredo Zapatto traîne son désoeuvrement dans les bas quartiers de Naples. Dans ces années d’après-guerre, il ne fait pas bon être chômeur et vagabond en Italie. Tout en flânant, il jette un coup d’œil dans les poubelles qui encombrent les rues. Son regard est attiré par un superbe os de côtelette dont il se saisit sans hésiter en se disant que Casino, son chien, appréciera ce festin. De retour dans son gourbi, le clochard se ravise. Il nettoie l’os méthodiquement, le fait bouillir dans une mixture de sa composition, le fait sécher et le passe à l’encaustique. Puis, se parant de sa plus belle chemise, il va frapper à la porte d’une comtesse dont le mari a été fusillé à la Libération. Une heure plus tard, après avoir échangé sa côtelette contre cinq billets de mille lires, notre astucieux vagabond quitte le salon de la dame en se frottant les mains.
Le lendemain, il récidive avec un autre os et un autre Napolitain, sentimental et argenté. Cet étrange trafic prospère à tel point que Fredo s’acoquine bientôt avec une horde de traîne-savates, qu’il charge de le ravitailler en vieux os.
Trois ans plus tard, alors qu’il roule dans une voiture américaine d’occasion, Fredo est arrêté pour escroquerie. La police a, en effet, découvert que l’ex-chômeur se livre à un commerce macabre. Zapatto fournit à une clientèle d’anciens fascistes des « reliques », des os qu’il prétend avoir subtilisés sur le cadavre de Mussolini. Cadavre qui, comme on le sait, avait été suspendu à un crochet de boucher, en 1945, en compagnie de celui de sa maîtresse.