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 L'étang de feu (d'Alice) - Russie

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Joa
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Joa


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L'étang de feu (d'Alice) - Russie Empty
MessageSujet: L'étang de feu (d'Alice) - Russie   L'étang de feu (d'Alice) - Russie EmptyDim 12 Aoû - 10:02

Il y avait, jadis, tout au fond de l'immense Russie, un village où vivait une femme dont tout le monde avait peur. Elle était aussi méchante et aussi laide qu'elle était riche, ce qui n'est pas peu dire. En effet, elle possédait à elle seule plus de la moitié des terres du village. Elle y faisait travailler de pauvres journaliers qu'elle payait fort mal et renvoyait sans scupules dès qu'ils tombaient malades. Elle ne se souciait pas de savoir s'ils retrouveraient un emploi, s'ils parviendraient à nourrir leurs enfants et à leur donner un toit. Du moment qu'ils n'étaient plus en mesure de la servir, elle les chassait. Jamais personne ne l'avait vue donner quoi que ce fût. Aussi, dans son village, même les gens les plus charitables la vouaient aux flammes de l'enfer, disant qu'elle finirait bien par payer dans l'autre monde tout le mal qu'elle avait fait dans celui-ci.
Elle était d'une solide constitution, et pourtant, vers sa soixantième année, elle mourut d'un mal mystérieux qui l'emporta en quelques jours.
Naturellement, personne ne la pleura, et c'est sans prière ni regret que ses voisins virent sa dépouille prendre le chemin du cimetière.
Or des diables vigilants guettaient depuis longtemps le moment où elle rendrait son âme. Prompts comme la foudre, dès qu'ils eurent entendu son dernier soupir, ils l'emportèrent et la jetèrent dans l'étang de feu.
Cet étang était presque de la taille d'un petit lac. Je ne sais quel liquide l'emplissait, mais de hautes flammes naissaient à sa surface qui grésillait comme de l'huile au fond d'une poêle. Sur ses rives aussi noires que du charbon ne fleurissaient que des braises qu'un vent brûlant attisait sans relâche. C'était un lieu effroyable où se débattaient tous les damnés morts dans cette région depuis des siècles.
Lorsqu'elle y fut précipitée par les démons, la femme se mit à hurler. Elle poussait des cris inarticulés où revenaient seulement, de loin en loin, les mots "mendiante" et "oignon". Les damnés qui l'entouraient se bornaient à hausser les épaules en lui ordonnant de se taire.
"La vie n'est déjà pas drôle ici, criaient-ils, si tu viens encore hurler comme une folle, ça n'arrangera pas les choses. Si tu es là, c'est que tu l'as mérité. Fais comme nous, résigne-toi. Tu vas griller durant l'éternité. Ceux qui ont été jetés ici n'en sont jamais sortis. Pourquoi ferait-on exception pour toi? Tu es tellement mauvaise que tu finiras par rendre l'enfer vraiment insupportable!"
Mais la mégère ne les écoutait pas. Elle continuait ses criailleries. Elle fit tant de vacarme qu'elle finit par attirer l'attention de son ange gardien. Le bon ange s'approcha de l'étang et demanda aux diables cornus la permission de s'entretenir un instant avec la malheureuse.
"Si tu veux, dirent les diables qui commençaientà en avoir par-dessus les oreilles. Et s'il est en ton pouvoir de la faire taire, nous t'en serons reconnaissants."
Dès que la femme aperçut son ange, elle s'en prit à lui en temes d'une telle vigueur que je les transpose un peu pour vous les rapporter:
"Espèce de propre à rien, lui criat-elle, tu es mon ange gardien, et voilà qu'au moment où j'ai besoin de toi, tu n'es pas là..."
L'ange, qui en avait entendu d'autres au cours de sa longue carrière, laissa passer l'orage. Enfin, lorsque la femme, à bout de souffle et à court d'injures, se tut, il lui dit:
"Je n'ai pas que toi à protéger. Quand tu es morte, j'étais au chevet d'une de tes esclaves qui est tombée malade d'avoir trop peiné pour emplir ta bourse. D'ailleurs, tu étais si coriace que persone ne s'attendait à te voir partir aussi vite.
- C'est vrai, recoonut-elle, mais je suis partie tout de même, et me voilà dans de beaux draps. Aïe! Que çà me brûle! Aïe Que je souffre! Tire-moi de là, espèce d'incapable!
- On ne tire pas les gens de l'enfer sans raison. Et toi, tu n'as pas une seule bonne action à ton actif.
- Comment! rétorqua-t-elle. Et l'oignon que je suis allée arracher dans mon jerdin pour le donner à une mendiante! Tu l'as donc oublié?
- Un oignon, grommela l'ange, un oignon, voyaons un peu..."
Et il tira de poche un gros carnet à couverture noire tout corné, qu'il se mit à feuilleter en mouillant son pouce à coups de langue. Il avait pris un peu de la hauteur pour éviter que les flammes ne viennent mettre le feu à son précieux répertoire. Il cherche donc à la lettre O;
"Voyons... Ocre... Odorat... Oeil... Oeuf, non tu n'aurais pas donné un oeuf. Certainement pas!
- J'ai donné un oignon, pleurnichait la femme.
- Tais-toi, laisse-moi chercher... Office... Offrir... Décidemment, il y a là des mots qui ne te concernent guère... Ogre... Ogresse... Ce serait déjà mieux... Oie... Tu as dû en plumer pas mal... Ah! voilà. Oignon. Nous y sommes... Callosité qui vient aux pieds... Grosse montre... Plante potagère à racine bulbeuse... En effet... Tu as raison. Tu as bien donné un oignon à une pauvresse qui mourrait de faim. Je l'avais inscrit, mais c'est tellement extraordinaire de ta part, que, dans mon idée, il s'agissait d'une autre... Mais, non, c'est bien toi."
L'ange réfléchit un instant, puis il ajouta:
"Tu avoueras que çà n'est pas grand-chose, mais enfin, pour une personne aussi avare, c'st une action d'une grande imprtance. Attends un moment... Je vais faire quelque chose pour toi."
Tandis que l'ange s'éloignait à tire-d'aile, la femme criait:
Dépêche-toi, grand paresseux. Je grile clomme une châtaigne! Aïe, que j'ai mal!3
Les aures damnés, qui avient fait cercle pour entendre ce qui se disait, continuaiient de se moquer d'elle en affirmant que l'ange ne reviendrait pas.
Et pourtant, quelques minutes plus tard, l'ange était de retour, tenant par sa queue encore verte un énorme oignon blanc qu'il venait d'aracher dans le potager de saint Piere. Il descendit en planant sur l'étang, écarta la fumée à coups d'aie, et tendit le bulbe à la femme en disant:
"Accroche-toi, et tiens bon. Tu as les ongles assez crochus. Je vais te tirer de là."
La femme se suspendit, et le bon ange se mit à tirer de toutes ses forces.
Il avait déjà sorti la femme des flammes jusqu'à hauteur hauteur des cuisses, lorsque les autres damnés comprirent qu'ils avaient une chance de s'évader eux aussi. Ils se précipitèrent et s'accrochèrent aux jupons de la femme qui se mit à leur donner des coups de pied dans les yeux en criant:
"Laissez-moi tranquille! cet oignon est à moi... C'est moi qu'on retire. Pa vous. Votre place est ici!..."
ELe n'eut pas le temps d'en dire davantage. La tige de l'oignon se brisa. L'ange fit un bond en l'air tandis que, serrant toujours le bulbe dans ses mains crispées, la femme retombait, soulevant autour d'elle un épais remous de feu. Il y eut un grésillement et une odeur d'oignon grillé, puis plus rien. Plus rien que le crépitement des flammes.
Ah! si, il y eut aussi les sanglots de l'ange qui s'éloignait tristement.
L'ange était désolé de n'avoir rien pu faire pour cette femme. C'est du moins ce que je pense, bien que les mauvaises langues prétendent que c'était l'oignon qui lui tirait tant de larmes.

Bernard Clavel
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