Le moins qu'on puisse dire, c'est que celui qui a inspiré la chanson Cadet Roussel n'avait rien pour mériter une telle renommée. Fils d'un officier de gendarmerie, né le 30 avril 1743 et cadet de deux enfants, d'où son surnom, Guillaume Joseph Roussel vint se fixer à Auxerre en 1763. Occupant d'abord des emplois mineurs, il s'enrichit en épousant une demoiselle de la bonne bourgeoisie, Jeanne Serpillon, et put s'acheter la charge de premier juissier audiencier au baillage d'Auxerre, qui lui procura un revenu de 2 000 livres par an, plus que confortable.
La Révolution ne dérangea nullement ce notable de province. Au contraire, il joua un rôle actif en faveur des idées nouvelles et continua d'exercer ses fonctions pendant le Directoire, le Consulat et l'Empire, jusqu'à sa mort, en 1807.
Comme on le voit, il s'agissait d'un personnage banal au possible, bien éloigné d'un héros de chanson burlesque. Sa maison, en particulier, dont il est fait mention au premier couplet, était une demeure cossue de la place du Prétoire, aujourd'hui place Fourrier, sans signe distinctif remarquable. En fait, cette chanson constitue une sorte de vengeance. Son auteur, le chevalier Chenu du Souchet, resté partisant de l'Ancien Régime, voulut ridiculiser un ancien huissier à la Cour royale devenu ardent révolutionnaire. Il a réussi au-delà de ses espérances et fait entrer Guillaume Joseph "Cadet" Roussel dans le folklore national.