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 Le jeune idiot

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Joa
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Joa


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Le jeune idiot Empty
MessageSujet: Le jeune idiot   Le jeune idiot EmptySam 17 Mar - 8:59

Il y avait une fois, un idiot. Un jour, sa mère l'envoya au marché, en lui disant : "Tiens, voici une pièce de vingt francs ; tu achèteras, au marché, un porcelet de dix francs. - Pui, mère, oui, bien sûr que je l'achèterai."
Notre gars s'en fut donc, et, tout de suite, il acheta son porcelet. Ne voulant pas s'en retrourner immédiatement chez lui, il perfora l'oreille de la bête d'un trou ayant les dimensions d'une pièce de dix francs. Puis, logeant sa piécette dans le trou, il dit au porcelet : "Va-t-en maintenant à la maison !" Et il chassa l'animal à coups de pierres.
Comme vous le pensez bien, notre cochon s'en fut où il voulait ; et le gars retourna le soir à la maison. Aussitôt qu'elle l'eut aperçu, la mère l'interrogea : "Tu as acheté le porc ? - Oui, mère. N'est-il pas venu à la maison ? - Non ! Pourquoi ? - Parce que je vous l'ai adressé cematin avec la pièce de dix francs. - Tu me l'as adressé, ce matin ? Imbécile que tu es ! Tu devais l'amener bien gentiment, attaché par la tête avec une corde ! - Tenez, mère, je l'amènerai ainsi la prochaine fois."

L'autre fois, la mère l'envoya acheter une cruche. Tandis qu'il s'en revient chez lui, il se rappelle la recommandation de sa mère et attache une corde à sa cruche. Puis, allant lui-même devant et sans plus regarder seulement en arrière, terren-ten-ten, il traînait sa cruche. A peine fut-il à la maison que la mère lui demanda : " Tu l'as achetée ?
- Oui, mère ; et je l'ai apportée, attachée ainsi que vous me l'aviez dit." La mère, s'étant approchée, vit, là, devant elle, une corde et, au bout de la corde, un bout de cruche, le goulot... tout juste ! "Mais, garçon stupide, tu devrais porter ça sur ta tête !
- Tenez, mère, je le ferai la prochaine fois."
La fois suivante, la mère l'envoya chercher un kilo de beurre. Voulant, cette fois du moins, le porter comme il convenait, il se le mit sur la tête. Or, il faisait une chaleur terrible, et il n'était pas encore rendu chez lui, que tout son beurre était fondu. Le voyant dans cet état, la mère lui dit : "Mais tu ne feras donc jamais rien comme il faut ? Tu devrais porter ça en le trempant et retrempant à toutes les fontaines que tu rencontrais. Ainsi l'aurais-tu porter absolument frais. - Mère, je vous promets que je le porterai ainsi la prochaine fois."
La suivante fois, donc, la mère l'envoie chercher une livre de sel. Notre gars, pendant faire on ne peut mieux, trempe le sel à tous les ruisseaux qu'il rencontre ; si bien qu'en arrivant chez lui, il ne lui restait plus ni sel ni seulement de papier !
Et alors - comme il en était bien temps - la mère commença à se demander si son fils n'était pas quelque peu innocent. Et cependant, voulant encore en tirer quelque chose, elle le garda auprès d'elle à la maison.

Mais, la mère ne tarda pas à avoir besoin de son fils, et elle lui dit un jour : "Il te faut aller au marché pour vendre ce miel. Tu le vendras à qui te blaguera le moins ; en un mot, ne le vends pas à ces personnes qui ne savent toujours que chicaner.
- Oui, mère, je ferai ainsi, bien exactement." Et voilà parvenu au marché le gars qui paraissait (!) quelque peu innocent.
Un quidam, tout de suite, lui demanda : "Combien ce miel, jeune homme ?" Et de lui répondre dare-dare : "Trop de paroles, trop de paroles !" On lui fait derechef la même demande, mais c'est pour entendre la même réponse. Et l'on n'y comprenait rien.

Un autre acheteur se présente encore à notre gars, pour demander lui aussi : "Combien ce miel, jeune homme ?" Et lui de se fâcher sérieusement : "Vous ne l'aurez pas, vous ne l'aurez pas ! Trop de paroles, trop de paroles !" Et pas un instant notre gars ne voulut en démordre.
Le soir, il rapportait le miel chez lui. Il s'arrêta devant un grand chêne. Estimant que ce chêne, lui au moins, ne disait rien du tout, il répandit sur lui tout son miel, assuré (?) que ce chêne s'acquitterait dans la quinzaine.
Quinze jours après, notre idiot s'en vit chercher son dû, et constate que tout son miel avait été dévoré par les mouche. Ces mouches voltigeaient par là, toutes bourdonnantes. Il se fâche pour de bon, et, sur-le-champ, va trouver le seigneur juge, à qui il dit : "Seigneur juge, de toutes petites femmes m'ont dévoré tout mon miel, et elle refusent de me le payer." Le seigneur juge de répondre : "Ami, je n'y puis rien, si je n'ai pas plus de preuve que cela. Tâchez d'attraper l'une ou l'autre de ces femmes, amenez-la-moi ici. Sans cela, je n'y puis pas grand-chose." Et voilà que notre gars se met alors à lui fournir d'autre détails, disant : "Ce sont de toutes petites femmes noires, telles qu'on en rencontre partout de pareilles."
A ce moment même, une mouche lui vint sur la main. Il la montra au seigneur juge : "Tenez, seigneur juge, voilà comme elles sont. - Boh ! ce n'est donc rien du tout ! Il vous faut les tuer, à chaque fois que vous les attraperez."
Là-dessus, une mouche étant allée se poser sur le front du seigneur juge, l'idiot lève un gros bâton qu'il avait à la main. De toutes ses forces il en frappe le front du juge, et puis va son chemin vers la maison.
La mère ne tarda pas à tout savoir ; et vous pouvez imaginer sa douleur ! Dès lors, elle le garda auprès d'elle, pour lui donner ses meilleurs conseils.
Après quelques jours, lorsqu'il parut à la mère que son fils avait recouvré la raison (!), elle lui dit : "Aujourd'hui, tu vas aller voir grand-père, afin de savoir s'il se porte bien. - Oui, mère, je vais certainement y aller."
Notre gars s'en fut donc. En arrivant là-bas, il trouva mort son grand-père, et vit tout le monde en larmes. Alors, sans dire un mot seulement, il s'en revit aussitôt chez lui, et sa mère l'interrogea : "Tu y as été ? - Oui, mère ! - Comment l'as-tu trouvé ? - Tenez, mère, il était mort, et je m'en suis retourné, sans rien dire. - Mais tu n'es donc qu'un insensé !… Tu aurais dû, tout de suite t'agenouiller, pour dire le Notre Père, le Je vous salue et le Requiem ! Retournes-y tout de suite, et fais comme je t'ai dit. - Oui, mère !…"

Il s'en va donc aussitôt, or, en y arrivant, il trouva les gens occupés à tuer le cochon. Et, sans penser à mal, devant le cochon, il récita le Pater, le Je vos salue et le Requiem

Mais il n'avait pas encore épuisé la série de ses sottises !
Quelques jours après, la mère l'envoya chez une sœur à lui. Il s'en fut donc et trouva sa sœur occupée à panser un mal qu'elle avait au pied. L'idiot fait comme s'il ne l'avait pas vue, et il s'en revient chez lui. La mère lui demande : "Tu y as été, dis ? - Oui, mère ! - Que t'a-t-on dit ? - Tenez, mère, elle était en train de se soigner un mal, et je m'en suis retourné sans mot dire. - Mais, tu n'appendras donc jamais rien ?… Vas-y de nouveau, et tu diras à ta sœur : Puissiez-vous en avoir peu comme cela, et, encore, puissent-ils avorter tous ! - Oui, mère !"
Il s'en fut, et, avant qu'il fut rendu chez sa sœur, il vit le serviteurs de la maison occupés à planter des pommiers et des poiriers. Voulant, sans l'oublier, s'acquitter de la commission maternelle, de bien loin il leur cria ; "Puissiez-vous en voir peu comme cela, et, encore, puissent-ils avorter tous !" Et il s'en revint à la maison, bien persuadé d'avoir, cette fois du moins, bien exécuté sa consigne.
Comme toujours, sa mère lui demande : "Tu y as été ? - Oui, mère ! - Et ? - Tenez, ils étaient dans les champs, en train de planter des arbres fruitiers. Alors, craignant un oubli, sans aller jusqu'à la maison, là même, d'un peu loin, je leur ai crié, ainsi que vous me l'aviez dit. - Mais, je t'avais dit, moi, d'aller jusqu'à ta sœur, et non pas de crier ainsi à ces gens-là… Tiens, comme, aussi bien, tu a besoin d'apprendre enfin quelque chose, tu vas aller cette fois, dans le même champ, et, à ces hommes que tu as vu tout à l'heure, tu diras : Plaise à Dieu que vous en ayez beaucoup comme cela, et qu'ils vous fructifient à foison !"
Notre gars commençait à se fâcher. Il était bien décidé à faire sa commission à sa sœur elle-même, cette fois. Pour éviter d'être vu par les hommes qui travaillaient dans le champ, il prend un autre chemin, et s'en va tout droit chez sa sœur. Celle-ci étant encore occupée à soigner ses maux, du seuil même de la porte il lui cria : "Plaise à Dieu que vous en ayez beaucoup comme cela, et qu'il vous fructifient à foison !" Et, sans attendre quelle réponse lui serait faite, comme d'habitude, il s'en fut à la maison.

Et la pauvre mère ne désespérait pas encore, et elle attendait que son fils recouvre encore plus de bon sens.
Et voici qu'un matin, elle lui dit : "Tiens, va passer la journée avec tels de nos voisins. En arivant chez eux, présente tes compliments, et puis, ici et là, jette quelques coups d'oeil."
L'idiot, tout d suite, s'en fut à leur bergerie. Là, il arrache les yeux à toutes les brebis, et puis, ayant serré tous ces yeux dan sa poche, il s'en va, s'essayant pour la première fois à siffler.
Il arrive, il serre la main au premier venu. Puis, de sa poche tirant une poignée d'yeux, il les lui jette coup sur coup. Il va ensuite à un autre et répète avec lui le même manège. Et puis, il n'a de cesse qu'il n'ait jeté et jeté encore, jusqu'au dernier, tous les yeux de ses moutons. Le dernier une fois jeté, il s'en retourna chez lui, reprenant, pour les continuer, les mêmes sifflements que tout à l'heure.
La pauvre mère, alors, se convainquit que son fils n'était pas comme tout le monde, et qu'il lui valait mieux de ne plus l'adresser à personne. Et depuis, notre gars est là, qui demeure auprès de sa mère.
Et voilà pourquoi aussi nous ne le voyons plus faire de commission, comme par le passé.

Jean Barbier, Contes, récits et légendes des pays de France
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