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 La cathédrale

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Joa
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Joa


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MessageSujet: La cathédrale   La cathédrale EmptyLun 28 Mai - 10:10

Un soir d'hiver, un honnête gantier de la rue de Saint-Guenhaël revenait de la place Mainlière, à Vannes, où il avait donné ses soins à un tailleur de ses amis qui s'en allaitn mourant. Comme il passait devant la cathédrale, dont les portes n'étaient point encore fermées, il voulut, avant de regagner sa demeure, prier pour l'objet de son affection et de ses inquiétudes, et, dans cette intention, il pénétra dans l'église et alla s'agenouiller au fond d'une des chapelles latérales.
A cette heure avancée, il y avait peu de fidèles dans le saint temple, l'obscurité y était presque complète, et le plus profond silence y régnait. Fatigué de plusieurs nuits de veille, le bon gantier ne tarda pas à s'endormir, et si profondément, qu'il n'entendit ni la voix des cloches tintant l'Angelus, ni le bruit des clefs agitées par les bedeaux avant la clôture des portes, et se trouva ainsi enfermé dans la cathédrale.
A la douxième heure de la nuit, le gantier transi de froid se réveilla enfin, et jetant autour de lui des regards surpris, il eut quelque peine à se rendre compte du lieu où il se trouvait. Mais bientôt l'étrange spectacle qu'il eut sous les yeux lui rendit la mémoire ; car, au pied de l'autel près duquel il s'était endormi, un prêtre, revêtu d'une chasuble noire, à large croix blanche, était debout, prêt à commencer une messe, et sur l'autel, couvert d'un drap noir lamé de blanc, vacillaient les pâles clartés de deux bougies ornées de têtes de mort et d'os croisés en sautoir.
Qhoique préoccupé de sombres pensées, et fort ému de cette scène lugubre qui le surprenait tout à coup, le gantier remarqua qu'il n'y avait point de répondant, et s'apprêta à servir lui-même la messe. Il alla se mettre à genoux aux pieds du prêtre, sur lequel il jeta furtivement un regard.
O terreur ! ce prêtre était un squelette aux os sans chair, aux orbites creuses et vides !
Eperdu, anéanti, le gantier tomba sans sentiment la face contre terre, et ce ne fut qu'à l'Angelus du matin qu'il reprit connaissance et regagna sa demeure.

Mais au sein même de sa famille qui l’entourait de soins, il restait toujours sombre et taciturne. Le sourire n’approchait jamais de ses lèvres, et jamais sa bouche n’avait de douces paroles pour sa compagne, de tendres baisers pour ses enfants. La nuit même, le repos ne visitait plus sa couche, et quand la fatigue lui apportait le sommeil, ce sommeil était plus laborieux que ses pénibles veilles, traversé qu’il était de terreurs incessantes sur lesquelles son intelligence troublée n’avait aucun empire. Pour sauver sa raison et tenter de rendre un peu de calme à son âme, le malheureux gantier résolut enfin de recourir au prêtre chargé de la direction de sa conscience, et de lui révéler la cause de ses terribles émotions.
- Pourquoi, mon fils, lui dit le prêtre abandonner ainsi votre âme à des terreurs qui sont peut-être le fruit d’une erreur des sens, et qui, si elles sont les effets d’une effrayante réalité, doivent être sérieusement approfondies, car le démon vous a tendu un piège dans cette nuit dont le souvenir vous tourmente, ou Dieu lui-même vous a choisi pour être l’instrument d’une sainte expiation, d’une réparation nécessaire. Il faut donc, mon fils, dans le double intérêt de votre salut temporel et de votre salut éternel, aller attendre, dans la même chapelle et à la même heure, l’apparition qui vous a tant épouvanté.
- Hélas ! mon père, répondit le gantier, n’imposez pas à ma faiblesse une épreuve qui me tuerait…
- Sans doute elle vous tuerait, reprit le prêtre, si vous tentiez de la subir armé de la seule raison. Mais vous le savez, mon fils, la foi rend invincible, et la prière est la plus sûre de toutes les armes ; priez donc et croyez ! Et si le spectre vient encore à vous, interrogez-le au nom du Dieu vivant ; qu’il dise ce qu’il veut et au nom de qui il vient. Allez, mon fils, je vous absous, que Dieu vous soutienne !
Le soir même, fort de sa foi, mais faible dans sa chair, le gantier se rendit à l’église, s’agenouilla dans la même chapelle et se fit enfermer encore, mais cette fois-ci il ne s’endormit pas ; il pria jusqu’à l’heure attendue avec impatience, et pourtant redoutée.
Au premier coup de minuit, les deux bougies s’allumèrent d’elles-mêmes ; l’autel se tendit de noir ; puis d’un pas lent et sourd, le squelette, revêtu de la chasuble de deuil, parut à l’entrée de la chapelle.
- Si tu viens au nom de Satan, s’écria le gantier d’une voix émue, retire-toi, fuis ce temple saint ; mais si tu viens au nom de Dieu tout-puissant, dis, que veux-tu ?

- Ecoute et crois, mon fils, celui qui vient au nom du Seigneur, murmura le spectre... Voilà déjà bien des années, oh ! des années bien longues pour ceux qui souffrent ! que chaque nuit, à la même heure, j'attends, à cet autel, un chrétien qui me réponde une messe que j'avais promise, quand j'étais au nombre des vivants, et que je n'ai point dite alors, par négligence d'abord, par oubli ensuite. Cette négligence et cet oubli coupables ont eu de suites terribles, car ils ont pour longteps fermé les portes du ciel à l'âme de celui qui devait la dire, et aussi à l'âme de celui pour qui elle devait être dite... Sois béni, mon fils, toi que Dieu a choisi pour être l'instrument du salut de deux âmesz !...
Aussitôt le spectre et le gantier s'agenouiillèrent au pied de l'autel, et la messe des morts commença ; mais quand le prêtre eut prononcé le requiescat in pace, il disparut, et le gantier, jetant les yeux vers la croisée, vit deux traînées lumineuses qui montaient au ciel...
Il essuya alors la sueur glacée de son front, attendit dans la prière l'heure de l'Angelus, et quand il rentra dans sa famille avec un doux sourire aux lèvres, il y rapporta le calme et la joie, car son âme était complètement rassérénéée.

Dr A. Fouquet, Contes, récits et légendes des pays de France
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