Il y avait un homme et une femme, et l'homme était marchand de cochons. Il dit à sa femme :
- I m'en vas m'en aller à la foire, i ne viedrai pas de huit jours.
Sa femme dit :
- Hé ben ! I n't'attendrait pas de huit jours.
Et puis, le cur la fréquentait, comme bien entendu. Ma foi, le curé arrive. Elle lui dt :
- Mon homme est parti à la foire ; nous ferons une petite noce.
Ilsont fait leurs préparatifs pour faire la noce : un petit gâteau, un petit barricot de vin, un petit goret (cochon) qu'ils ont fait rôtir.
Et puis, le bonhomme dans son chemin rencontre un gosse.
Qu'il dit :
- Toi, tu vas t'en aller chez nous, et tu demanderas à loger.
Le gosse arrive, frappa à la porte. Ils étaient après faire rôtir le goret. C’était le curé qui tournait la broche.
- Qu’est ça ? que dit la femme.
- OI est moi ! que dit le petit gosse.
- Qui donc toi ?
Qu’il dit :
- Si vous vouliez me loger !
Le curé dit :
- Tu peux bien le faire rentrer, va ! Il tournera bien la broche, lui !
Allons, le gosse rentre, et puis le curé lui dit :
- Mets-toi là, petit bougre, tu tourneras la broche !
Et puis, peut-être bien une demi-heure après, le bonhomme arrive, lui, frappe à la porte.
- Qu’est ça ?
- Hé ! Qu’est ça ? OI est moi, pardié !
- Ah, mon Dieu ! Il es ben déjà de retour !
Il a fallu que la femme se lève, cache tous les préparatifs. Elle a mis le gâteau dans le tiroir de la table, le barricot de vin sous le lit, le goret sous la cheminée ; le curé s’est fourré dans la rèse (la ruelle) du lit, et puis, ma foi, elle a ouvert la porte.
Il s’en va juste au feu, regarde dans le coin, trouve le gosse :
- é tu fais là, p’tit bougre ?
- n’fais point ren, qu’il dit. J’ai demandé à loger à votre femme, et puis elle m’a fait rentrer.
- , p’tit bougre ! qu’il dit, est-ce que tu ne serais pas mieux domestique, non pas d’être là à ren faire ?
- ! n’m’en parlez pas ! qu’il dit. I y étais ben étou (aussi). Seulement, qu’il dit, i y étais si heureux là-bas ! I gardais des grands chétifs cochons : i n’voulaient seulement pas arrêter ; ils étaient si méchants ! Y en a un qui m’a mordu, sortait du sang qu’était si rouge comme le vin qu’est dans le barricot sous le lit ! Ah ! sans vous mentir, il y en avait un petit, qu’il dit, il était aussi gros comme celui qu’est sur le coin de la cheminée.
- Sacré p’tit bougre, qu’il dit, tu me feras faire un bon souper ce soir.
- Oh ! sans vous mentir, il y avait une grosse, méchante vache, qu’il dit, elle ne voulait point arrêter ; elle avait des grandes cornes, qu’étaient aussi grandes comme le gâteau, qu’est dans le tiroir de la table.
Le bonhomme regarda dans le tiroir de la table, il trouva le gâteau.
- Cré p’tit bougre, qu’il dit, tu me feras faire un bon souper.
- Ah ! qu’il dit, sans vous mentir, il y avait une grand’treue goronnière qui ringeait (grinçait) des dents, qu’il dit, comme le curé qui est dans la rèse du lit.
Le bonhomme a pris sa courge (gourdin) et il a sorti le curé de la rèse du lit, oui ! Et puis, il a battu sa femme, il l’a battue ! Ma foi ! Pendant qu’il était à même !
Léon Pineau, Contes, récits et légendes des pays de France