Le souvenir de sainte Ninnok s'est longtemps conservé à Ploemeur et dans la région. Cette pieuse jeune fille, qui vivait au Ve siècle, y a fondé un monastère de femmes. La légende raconte que le chef breton Erek poursuivait une biche, lorsque celle-ci se réfugia dans l'église. Il voulut la tuer quand même, mais il vit ses chiens cesser brusquement d'aboyer et se coucher à ses pieds.
Emerveillé par ce miracle, il couvrit saint Ninnok et son couvent de richesses. Selon la même légende, la biche est devenue immortelle et parcourt depuis les forêts. Mais elle s'est transformée en divinité malfaisante. Malheur à celui qui la rencontre ! Il devra mourir dans l'année et, s'il s'agit d'un jeune homme ou d'une jeune fille, il périra de mort violente le jour de ses noces. C'est, dit-on, ce qui est arrivé, au XVIe siècle, au comte Alain de La Sauderaie, qui avait vu la bête et dont on retrouva le cadavre ensanglanté dans la forêt, alors qu'on le cherchait pour la cérémonie.
Cette croyance rappelle celle de Penmarch dans le Finistère, où une biche est la réincarnation d'Ahès, la princesse maudite armoricaine. Mais, de manière générale, on retrouve dans toute la France ces légendes de transformation en biche ou en cerf. Il faut sans nul doute y voir une christianisation du culte de Cernunnos, le dieu gaulois de la mort, figuré par un cerf.
Cette divinité, très importante dans le culte de nos ancêtres, était à la fois maléfique, car elle était liée à l'au-delà, et bénéfique, car le cerf, qui perd ses bois chaque hiver et les retrouve chaque printemps, est un symbole d'éternité.