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 Le diable et la fileuse

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Joa
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Joa


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Le diable et la fileuse Empty
MessageSujet: Le diable et la fileuse   Le diable et la fileuse EmptyLun 30 Oct - 9:46

Le diable rustique ne ressemble guère à celui des Ecritures. Dans nombre de contes populaires, comme déjà dans les fabliaux du Moyen Âge, il apparaît généralement comme un gros nigaud qui se laisse berner plus souvent qu'à son tour par la ruse des paysans.
A Faymont, il y avait une fois une femme qui n'aimait guère le travail et qui, surtout, détestait de filer. L'oeuvre (filasse) s'amassait dans son grenier sans qu'elle se décidât à faire marcher son rouet. Son mari lui en faisait souvent le reproche. Un jour, il finit par lui dire qu'elle était la femme la plus paresseuse du monde et qu'ils n'auraient bientôt plus de chemises à se mettre sur le dos, puisqu'elle n'était pas capable de filer seulement trois écheveaux de fil. La femme répondit : "Ce n'est pas la peine de me mettre à l'ouvrage pour ce peu d'oeuvre que nous avons, mais que j'en ai dix fois autant, et vous verrez que vous aurez bientôt de la toile à charger votre cheval. - Eh bien, dit le mari, si c'est de l'oeuvre qu'il vous faut, je vous contenterai." Le soir, il ramena, sur sa charrette, une telle quantité d'oeuvre, que le grenier en était plein. "Cette fois, dit-il à sa femme, vous ne vous plaindrez pas de manquer de besogne ; filez, puisque vous êtes si bonne fileuse, et quand vous aurez fini ce qu'il y a d'oeuvre dans la maison, je vous tiens quitte pour le reste de notre vie, car nous aurons des draps et des tuailles (nappes) et des chemises pour jusqu'à la fin de nos jours."
L'homme partit pour les champs et la femme resta seule, en face du monceau d'oeuvre. Plus elle le regardait, plus la colère la prenait, tant qu'à la fin elle s'écria : "Je donnerais bien toute cette oeuvre au diable, et moi avec, s'il voulait me la filer."
Elle n'eut pas plutôt dit cela que la porte s'ouvrit et qu'un beau jeune homme, avec des yeux brillants comme deux braises, entra dans la chambre. Il dit à la femme : "Tu veux que je te file ton oeuvre, c'est dit, je te la filerai, mais à une condition : c'est que tu devineras mon nom, sans quoi, tu m'appartiendras. - Mais, dit la femme, ce n'est pas le tout de me faire le fil, il faut encore tisser ma toile. - Je te la tisserai, dit le diable, et dans trois jours tu l'auras, mais, rapelle-toi que tu n'as que trois noms à essayer pour deviner le mien. - Mais, dit la femme, si vous n'avez pas fini dans trois jours, ou voulez-vous que j'aille vous réclamer ma toile ? Je ne sais pas où vous trouver ? Le diable dit : - Tu n'as quà venir à l'ancien ermitage, qui est dans le bois, au croisement des chemins ; tu verras un grand poirier devant la maison."

Le diable s'en alla, avec l'oeuvre sur le dos. La femme, en le voyant porter si facilement cette charge, réfléchit qu'il pourrait peut-être bien avoir aussi fini la toile dans les trois jours, et elle chercha comment elle pourrait bien deviner le nom du diable. Elle se dévêtit et se frotta tout le corps de mélasse, elle décousit un douvot (édredon), et se roula dans les plumes, qui restèrent collées à la mélasse, puis elle s'attacha autour des reins une poche aussi passée dans la mélasse et les plumes et s'en alla vers la maison du diable. Quand elle y fut, elle monta sur le poirier, et se mit à sauter dans les branches, en criant : "Hi ! hi ! hi ! Hou ! hou ! hou !", comme une chouette. Le diable, qui était en train de filer, sortit et regarda longtemps cette bête emplumée qui sautait et qui chantait sur son poirier. "Foi de Capuchiret, je n'ai jamais vu pareille bête." Et la femme sautait et se démenait encore plus fort dans les branches, tant que le diable se mit aussi à rire et à danser en chantant :
Si la femme savait ! Que je m'appelle Capuchiret ! C'est elle qui rirait !
"C'est bon, se dit la femme, maintenant je sais ton nom." Et elle laissa tomber la poche qu'elle s'était attachée aux reins. Le diable la ramassa et dit : "Tu peux chanter, ma pauvre chouette, tu n'as plus de bec, tu n'as plus d'ailes, et tu as perdu ta queue : je vais l'accrocher dans ma chambre."
La femme s'en alla chez elle. Le troisième jour, le diable vint, avec plus de trois cents aunes de la plus belle toile qu'on ait jamais vue. Il dit à la femme : "Voilà ta toile, maintenant, dis-moi mon nom. La femme dit : - Las moi ! Comment voulez-vous que je devine ? - Je t'ai dit que tu pouvais essayer trois fois, dit le diable, c'est à toi à ne pas te tromper. - Eh bien ! dit la femme. Vous vous appelez Jacques ? - Non, dit le diable. - Alors c'est Pierre. - Non, dit-il, fais attention, c'est le dernier nom. - Attendez, dit la femme, est-ce que ce n'est pas Capuchiret ? Le diable fit un grand saut en arrière en disant : - Je jure par la vieille chouette qui chantait l'autre jour sur mon poirier que je ne ferai jamais plus d'affaires avec une femme. Quand le diable et la femme luttent de malice, c'est toujours le diable qui a le dessous." Le diable s'en alla tout capot (confus) et la femme eut de la toile, tant qu'elle n'eut plus besoin de filer jusqu'à la fin de ses jours.

Edgard COULON, Légendes, croyances et contes du pays de Montbéliard, 1930
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