Sur la façade sud de la cathédrale d'Amiens, une sculpture rend honneur aux marchands "waidiers" qui ont contribué à son édification.
Les waidiers étaient ces teinturiers qui utilisaient depuis le XIIe siècle la guède, en picard waide, plante tinctoriale aux fleurs jaunes, qui donne pourtant des pigments bleus.
Cultivée sur les limons des plateaux crayeux de la région, elle se récoltait tout l'été.
L'eau, abondante dans la Somme, alimentait les moulins où étaient broyées les feuilles séchées, pétries, pressées, vendues sous forme de boules appelées coques, ou cocagnes.
Cela développa une activité très lucrative dans le quartier Saint-Leu d'Amiens, autour des canaux, où l'industrie textile était prospère ; le bleu d'Amiens subtil, profond, qui offre des nances très recherchées pour teindre les tissus, s'exportait à prix d'or vers l'Angleterre et la Hollande.
Longtemps la waide cultivée dans l'Amiénois est restée le seul moyen d'obtenir ue teinture bleue.
Mais la guerre de Cent Ans avec l'Angleterre a eu des répercussions désastreuses sur les exportations et fait émigrer la culture vers le sud-est, nouveau "pays de cocagne".
L'arrivée de l'indigo des Antilles et de l'Amérique au XVIIIe siècle a sonné le glas du bleu d'Amiens.
Seules quelques touffes de waide sauvage évoquaient encore son passé glorieux jusqu'au jour où quelques passionnés ont décidé de lui redonner une nouvelle chance.