A Provins, dans la Seine-et-Marne, est honoré un saint peu connu.
Quiriace, martyrisé sous l'empereur Julien. Jeté dans une fosse qui contenait "des lézardes et des dragons cornus", il s'en sortit indemne et le bourreau dut le tuer en lui perçant la poitrine d'un épieu. Tout naturellement, Quiriace est devenu le saint protecteur contre les serpents venimeux : une prière suffisait pour ne pas être piqué, toucher ses reliques guérissait d'une morsure. Saint Quiriace fut aussi à l'origine d'une curieuse fête, qui renvoyait sans doute à des rites païens plus anciens, la "Fête de la lézarde"... Le jour des Rogations, fin avril, deux processions partaient de deux églises de la ville. En tête de celle de saint Quiriace, marchait un sonneur, brandissant au bout d'un bâton un dragon de bois peint. En tête de celle de Notre-Dame, un autre sonneur faisait de même avec une effigie de la lézarde. Lorsque les deux cortèges se rencontraient, les deux monstres simulaient un combat : ils étaient tous deux couronnés de guirlandes fleuries et celui qui laissait tomber le moins de fleurs à terre était déclaré vainqueur.
Cette coutume poétique n'a pas survécue à la maheureuse et déloyale initiative d'un sonneur de saint Quiriace. En 1760, celui-ci imagina, pour remporter une victoire totale sur le camp d'en face, de mettre le feu à la lézarde. Il avait dissimulé des bougies sous ses guirlandes et les lança contre son adversaire. La lézarde prit effectivement feu, mais le dragon aussi, ainsi que les robes des prêtres et des enfants de choeur présents. Tout le monde trouva heureusement le salut en se jetant dans la fontaine la plus proche. Mais, depuis, la procession a été interdite et l'on ne voit plus ni dragon ni lézarde dans les rues de Provins.